Homélies


Attention : le service abonnement est supprimé (voir ici)

Bible ouverte

| 17e dimanche B | 18e dimanche  B |

17e dimanche dans l'année B

25 juillet 2021

Imprimer l'homélie

La multiplication des pains est le seul miracle de Jésus qui nous soit rapporté (et à six reprises !) par les quatre évangiles. C'est dire l'importance que lui attribuaient les premiers chrétiens. C’est la version de Jean que nous venons d’entendre. Elle est tellement développée qu’il nous faudra pas moins que cinq dimanches pour l’entendre en entier.

Saint Jean nous dit donc que la foule ne court pas après Jésus pour se convertir, mais pour obtenir des guérisons, sans du tout comprendre qu’il s’agit de « signes. » On sait que Jean ne parle pas de miracles mais de signes, porteurs d’un sens caché qu’il s’agit de décrypter, sous peine de ne voir en Jésus qu’un guérisseur à qui on arrache quelque faveur.

« Où pourrions-nous acheter du pain pour qu’ils aient à manger ? » La question est étonnante. Alors que tous les autres miracles sont accomplis à la demande des hommes, ici c’est Jésus qui en prend l’initiative. Philippe calcule l’énorme somme d’argent qui serait nécessaire et que l’on n’a pas. André signale les provisions d’un petit garçon, tellement insignifiantes vu les besoins ! Mais Jésus a trouvé ce qu’il cherchait dans ce petit garçon anonyme. Lui au moins ne calcule pas comme les grandes personnes et il a généreusement présenté la collation que sa maman lui a donné pour son excursion. Jésus ne se contente pas donc d'être rempli de compassion pour la foule affamée - comme nous le serions nous aussi facilement - mais, en nouvel Elisée (première lecture) il leur donne de la nourriture. 

Jésus a dit et répété que son royaume n'est pas de ce monde, mais aussi que ce royaume se réalise dans ce monde. Il est, Lui, le pain de vie; mais la vie humaine normale, ici-bas, est un élément de cette vie éternelle qu'il est venu apporter à l'humanité. Les hommes ont besoin de nourriture spirituelle; mais ils ont aussi besoin – et même en premier lieu, – de nourriture matérielle. Le problème de la faim dans le monde est un problème de juste répartition plutôt qu'un problème de ressources. Lorsque 6 % de la population mondiale consomme 90 % des ressources naturelles, nous ne sommes pas devant un problème de ressources ni un problème démographique. Nous sommes devant un problème de justice sociale. Ne pourrait-on pas comprendre dans ce sens du partage l'exhortation de saint Paul : « ayez beaucoup d'humilité, de douceur et de patience, supportez-vous les uns les autres avec amour ; ayez à cœur de garder l'unité dans l'Esprit par le lien de la paix. »

Le texte ajoute ensuite : « Il prit…. rendit grâce … il donna… » C’est la phrase par laquelle les trois autres évangiles racontent l’institution de l’Eucharistie, et que, depuis des siècles, nous entendons à la messe. L’allusion eucharistique est claire, et sa place, en un second temps dans le récit, nous fait percevoir que l’Eucharistie ne commence pas par un rite, mais par l’écoute de la faim des hommes.

Mais revenons au jeune garçon. L’adulte gagne sa vie, tandis que l’enfant ne la gagne pas. C’est pourtant celui-ci qui détient la seule nourriture disponible. Pas n’importe quoi : du pain et des poissons, les deux symboles du Christ lui-même dans l’Église primitive. C’est bien l’enfant, celui qui doit s’appuyer sur un autre pour vivre, qui détient la Sagesse (Matthieu 19,14). L’enfant fait partie de ces pauvres auxquels seuls appartient le Royaume des Cieux.

Le contraste est aussi grand enfin entre l’énormité des deux cents journées de travail et l’insignifiance des cinq pains et deux poissons. Pour que Dieu puisse agir, il faut que l’homme apporte quelque chose, ce qu’il a et qui est sans proportion avec le don. Philippe n’avait apporté qu’une réponse superficielle. Le jeune garçon, lui, offre son propre repas, certes dérisoire au regard des cinq mille hommes. Mais Dieu donne en faisant donner, car pour recevoir, l’homme doit entrer dans le mouvement, dans la logique du don.

Comme le jeune garçon, le Christ donnera ce qu’il a et ce sera vraiment tout ce qu’il a : sa chair et son sang. Mais la chair livrée et le sang versé seront nourriture de l’homme pour la vie éternelle.

Haut de page


18e dimanche dans l'année B

01 août 2021

Imprimer l'homélie

Après le récit du miracle des pains, saint Jean développe une longue et profonde méditation sur Jésus Pain de vie. Aujourd’hui il nous montre la foule qui se met en recherche de Jésus puis le trouve.

Chercher et trouver, dans saint Jean, sont des verbes très forts. Que cherche l’homme ? Il veut satisfaire des besoins élémentaires : la faim, la soif, la santé. Cette recherche accapare la majeure partie de son temps : par nécessité dans une société sous-développée, par frénésie dans une société surdéveloppée. De part et d’autre, une telle quête ne débouche pas sur « l’unique nécessaire » : Dieu. Ou, pour le dire différemment, elle n’arrive pas au besoin d’être aimé et d’aimer. Car, dans la profondeur de notre être, Dieu est la source cachée d’où jaillit tout amour.

Jésus n’est pas sur la seule rive des nourritures terrestres. Il est passé sur l’autre rive, celle des nourritures spirituelles. Non qu’il dédaigne la recherche des biens terrestres : ne vient-il pas de rassasier ces affamés ? Mais il est sur une autre rive. Il est une autre rive. Il est un autre pain. Il comble une autre faim. Il assouvit le désir d’aimer et d’être aimé pour toujours, pour l’éternité. Il étire, plus à l’infini que les espaces stellaires, notre aspiration au bonheur éternel.

Le prince Salina, l’astronome du magnifique roman de Tomaso Lampedusa, Le Guépard, soupire après l’étoile : « Quand se déciderait-elle à lui donner un rendez-vous moins éphémère, loin des épluchures et du sang, dans le domaine des certitudes éternelles ? » Quand passerons-nous d’un rivage à l’autre ? Jésus est le soleil de nos jours, la lune de nos nuits. Il est le pain qui nourrit notre faim la plus tenace, celle que nous tentons de tromper par de fugaces satisfactions

Pour atteindre l'étoile, pour recevoir le pain chaud qui descend du ciel, pour cueillir la manne de la Parole divine, il n’est besoin que d’une chose : la confiance. Car Jésus lui aussi a faim et soif. Il veut être aimé en retour pour pouvoir nous remplir de son amour. Faire confiance, c’est croire. Croire c’est aimer. Jésus n’est pas descendu du ciel, il n’est pas venu du Père, pour donner quelque chose, mais pour se donner tout entier lui-même. Il vient se faire nourriture pour entrer au plus intime de nous. Il se fait notre manne.

Ouvrons nos cœurs, tendons nos mains, pour accueillir ce pour quoi nous sommes faits : Dieu. « Pourquoi dépensez-vous de l’argent pour ce qui ne rassasie pas ? », dit le prophète Isaïe. (55, 2) « Ils m’ont abandonné, moi la source d’eau vive, pour se creuser des citernes, citernes lézardées qui ne tiennent pas l’eau. », proteste Jérémie (2, 13). Ne restons pas de ceux dont nous parle saint Paul, et qui se laissent « guider par le néant. » Mais laissons-nous « guider intérieurement par un esprit renouvelé. » Adoptons « le comportement de l’homme nouveau, créé saint et juste dans la vérité, à l’image de Dieu. » Recevons Jésus, notre bonheur, le vrai pain descendu du ciel et qui donne vie, gratuitement.

Haut de page